mercredi 10 février 2010

Le casse-tête du pétrole irakien


Par Michael Schwartz*
(Titre original : "The Iraqi Oil Conundrum")


L'énergie et le pouvoir au Moyen-Orient

*Comment les puissants ont échoués.

Il y a à peine quelques années, une administration Bush en pleine confiance espérait évincer le dictateur irakien Saddam Hussein, pacifier le pays, y installer un gouvernement conciliant, privatiser l'économie, et établir l'Irak comme siège politique et militaire pour une présence dominante des Etats-Unis au Moyen-Orient. Ces succès étaient sensés, en retour, ouvrir la voie à des objectifs ambitieux, inscrits dans le rapport de 2001 de la task force secrète du Vice President Dick Cheney sur l'énergie. Ce rapport portait sur l'exploitation des monstrueuses et en grande partie inexploitées réserves d'énergie irakiennes - plus grandes que celles de tout autre pays hormis l'Arabie Saoudite et l'Iran - y compris le quadruplement de la capacité de pompage du pétrole irakien et la privatisation du processus de production.

Le rêve en ces temps lointains était de dépouiller l'OPEP - l'entente composé des principaux exportateurs de pétrole de la planète - du pouvoir de contrôle de l'approvisionnement en pétrole et de son prix sur le marché mondial. Comme "récompense" pour avoir élargi considérablement la production irakienne et avoir libéré sa distribution du contrôle de l'OPEP, les hommes-clés de l'administration Bush avaient imaginé que les États-Unis pourraient prélever une petite proportion de cette production de pétrole en augmentation pour compenser le coût prévu de 40 milliards de dollars de l'invasion et de l'occupation du pays. Le tout en un an ou deux.


*Une Inlassable ambition tempérée par un échec politique et militaire


Presque sept ans plus tard, c'est sans grande surprise que les choses se révèlerent un peu plus couteuses que prévu en Irak et que le plan n'avait pas fonctionné exactement comme envisagé. Bien que l'invasion de Mars 2003 ait rapidement renversé Saddam Hussein, le reste du programme ambitieux de l'administration Bush restait encore largement inaccompli.


Au lieu de la pacification rapide d'une nation reconnaissante, suivie du retrait de toutes les troupes américaines, à l'exception de 30 à 40000 hommes (qui devaient être en garnison dans des bases géantes loin des zones urbaines de l'Irak), l'occupation a déclenché des rebellions sunnites et chiites, tandis que les opérations de contre-insurrection américaines ont conduit à des carnages massifs , une guerre civile sectaire, le nettoyage ethnique de Bagdad, et une crise humanitaire qui occasionna des centaines de milliers de morts, quatre millions de réfugiés tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays, et un taux de chômage qui est resté constamment au-dessus de 50% avec tous les conséquences que sont la faim, la maladie et la misère qui en découlent.

Dans l'intervalle, le gouvernement du Premier ministre chiite Nouri al-Maliki, ardemment soutenu par l'administration Bush et jugé par Transparency International comme le cinquième le plus corrompu du monde, s'est transformé en un régime de moins en moins fiable pour les états-unis. En dépit des diktats et des désirs américains, il a réussi à établir des relations politiques et économiques cordiales avec l'Iran, à ralentir le processus de privatisation économique lancé par les administrateurs néocons envoyés à Bagdad en 2003, et s'est instauré lui-même comme le principal employeur du pays. Il semble même périodiquement réticent dans son rôle désigné comme hôte possible à long terme pour une force de frappe militaire américaine au Moyen-Orient.


Cette résistance s'est exprimée avec le plus de force lorsque M. Maliki a fait pression sur l'administration Bush pour qu'elle signe un accord de statut des forces (SOFA) en 2008 qui incluait un retrait complet de l'armée américaine d'ici la fin de 2011. Maliki a même exigé - et obtenu - une promesse de libérer les cinq énormes bases militaires "durables" que le Pentagone avait construit - avec leurs installations complexes, peuplées de dizaines de milliers d'hommes, dont pratiquement aucun irakien, même parmi les milliers de travailleurs non qualifiés qui font le sale boulot nécessaire pour maintenir ces véritables «villes américaines» en état de fonctionnement.


Malgré ces revers, l'administration Bush n'a pas abandonné l'idée que l'Irak pourrait rester le futur siège d'une présence américaine dans la région, pas plus qu'à l'élection présidentielle de 2008 ne l'a fait le candidat Barack Obama. Celui-ci a, en effet, à plusieurs reprises insisté sur le fait que le gouvernement irakien devrait être un allié puissant des USA et l'hôte le plus vraisemblable pour une force militaire de 50.000 hommes qui allait « permettre à nos troupes de frapper directement al-Qaïda partout où il existe, et démontrer aux organisations terroristes internationales qu'ils ne nous ont pas chassés de la région ».


Depuis son entrée dans le bureau ovale, Obama n'a pas sensiblement varié dans l'engagement d'établir l'Irak comme un allié clé au Moyen-Orient, en promettant lors de son discours sur l'état de l'Union que les Etats-Unis "continueraient de collaborer avec le peuple irakien" pour une durée indéterminée. Dans la même discours, cependant, le président a promis que «toutes nos troupes rentreraient à la maison», signalant apparemment l'abandon des plans militaires de l'administration Bush. Le secrétaire à la Défense Robert Gates, d'autre part, a récemment fait part d'une vision contraire, faisant allusion à la possibilité que les Irakiens pourraient être intéressés par la négociation d'un moyen de contourner l'accord SOFA pour permettre aux forces américaines de rester dans le pays après 2011.


* La "paralysie dynamique" force le pétrole à rester sous terre


Le pétrole irakien, lui aussi, est resté au centre de l'ambition constante de Washington, même tempérée par l'échec. Bien avant que le coût de la guerre ait commencé à inquiéter devant l'estimation du Congrès d'une facture de 700 milliards de dollars, l'idée d'utiliser les recettes pétrolières pour financer l'invasion avait disparu, tout comme l'idée de quadrupler la capacité de production en quelques années. L'espoir de le faire un jour, cependant, reste vivace. La spéculation que la production Irakienne pourrait - dans un avenir pas trop éloigné - dépasser celle de l'Arabie Saoudite semble représenter encore la principale stratégie de Washington pour repousser à plus tard la grave pénurie énergétique mondiale à venir.


Déjà avant les attentats du 11 Septembre 2001, la «Secret Energy Task Force» du Vice President Cheney avait prévu l'attribution des différents champs pétrolifères d'un futur Irak pacifié aux principales compagnies pétrolières internationales. Avant l'invasion de Mars 2003, le Département d'État avait effectivement élaboré une législation éventuelle pour un gouvernement post-Saddam Hussein, qui aurait transféré le contrôle des champs pétrolifères principaux à des géants étrangers du pétrole. Il fut alors prévu que ces sociétés investisse dans l'industrie pétrolière branlante de l'Irak les milliards nécessaires pour stimuler la production au maximum.


Peu après l'entrée des troupes américaines à Bagdad, le proconsul de l'administration, L. Paul Bremer III, promulgua la législation du Département d'État par décret (et en violation flagrante du droit international, qui interdit aux puissances occupantes le changement des législations fondamentales d'un pays conquis). Sous la bannière de la "débaasification" - le démantèlement du parti sunnite au pouvoir de Saddam Hussein - il avait également licencié des techniciens du pétrole, des ingénieurs et des administrateurs, ne laissant qu'une équipe réduite d'Irakiens pour gérer la production existante (et attendre l'arrivée des géants du pétrole avec toutes leurs compétences).


En peu de temps, beaucoup de ces professionnels devenus parias ont fuit vers d'autres pays où leurs compétences furent valorisées, créant ainsi une véritable exode des cerveaux qui, pour un temps, handicapa l'industrie pétrolière irakienne. Bremer nomma alors un groupe de consultants internationaux du pétrole et de cadres au sein d'une nouvelle structure (officialisée par l'ONU) nommée «Fonds de développement de l'Irak» (DFI), chargée de superviser l'ensemble des revenus pétroliers du pays.


Les administrateurs, techniciens et travailleurs irakiens qui avaient subsistés organisèrent rapidement une résistance remarquablement déterminée et efficace pour faire face aux projets de Bremer. Ils furent aidés en cela par une insurrection en pleine expansion.


Lors d'un épisode dramatique, Bremer annonça le transfert du contrôle du port de Bassorah (qui alors assurait le transit de 80% des exportations de pétrole du pays) d'une entreprise publique à KBR, une filiale de Halliburton, la société que le Vice Président Cheney avait autrefois dirigée. Prévoyant que leurs propres emplois disparaîtraient bientôt au profit d'une main d'œuvre importée, les travailleurs du secteur pétrolier se mirent immédiatement en grève. KBR se retira rapidement et Bremer abandonna le projet.


A la suite d'autres initiatives de Bremer, des entreprises étrangères de construction et d'énergie prirent en charge le développement, la réparation et différentes opérations sur les champs pétrolifères principaux d'Irak. Les résultats furent rarement suffisants et souvent destructeurs. Des contrats de réparation d'infrastructures ou de renouvellement furent souvent bâclés ou laissés inachevés, les sociétés internationales détruisirent des installations utilisables ou réparables parce que construites avec des technologies qui leur étaient étrangères, afin d'installer des équipements qui s'avérèrent en fin de compte incompatibles. Dans un cas, une réparation de pipeline de 5 millions de dollars est devenue une «modernisation» de 80 millions de dollars, projet qui a sombré sur des questions d'ingénierie insolubles et, trois ans plus tard, a été laissé inachevé. Dans plusieurs cas, les collectivités locales ont saboté ces projets, soit parce qu'ils employaient des travailleurs et des techniciens étrangers plutôt que des Irakiens, soit parce qu'elles avaient été conçues pour priver les habitants de ce qu'ils considéraient comme leur «juste part» des recettes pétrolières.


Dans les deux premières années de l'occupation, il y eut plus de 200 attaques contre des oléoducs et des gazoducs. En 2007, 600 actes de sabotage contre les pipelines et les installations avaient été enregistrés.


Après une vague initiale d'intérêt, les sociétés pétrolières internationales considérèrent les dangers et refusèrent poliment l'invitation de Paul Bremer à risquer des milliards de dollars sur les investissements énergétiques irakiens.


Après ce premier échec, l'administration Bush chercha une nouvelle stratégie pour assouvir ses ambitions pétrolières. Fin 2004, une fois Bremer hors du jeu, Washington négocia un accord entre le Premier ministre irakien parrainé par les états-unis Iyad Allawi et le Fonds monétaire international. Les pays européens promirent d'annuler un quart de la dette accumulée par Saddam Hussein, et les Irakiens promirent de mettre en œuvre le plan pétrolier américain. Mais cela ne fonctionna pas mieux que le plan Bremer. La poursuite des sabotages par les insurgés, la résistance des techniciens et des travailleurs irakiens, et la corruption et l'incompétence des compagnies contractantes rendirent tout progrès impossible. Les compagnies pétrolières internationales continuèrent à se tenir à l'écart.


En 2007, sous la pression directe des Etats-Unis, pratiquement la même loi fut approuvée à contrecœur par le Premier ministre Maliki et fut transmise au Parlement irakien, pour examen législatif. Au lieu de l'approuver, le Parlement s'imposa comme un nouveau centre de résistance au plan américain, ce qui souleva une myriade de plaintes [occidentales - Note du traducteur] familières, et refusa à plusieurs reprises de la soumettre à un vote. Elle est restée en sommeil jusqu'à ce jour.


Cette impasse resta inchangée durant la première année de l'administration Obama comme l'illustre le conflit qui se poursuit concernant le pipeline qui transporte le pétrole de l'Irak vers la Turquie, source d'environ 20% des revenus pétroliers du pays. Pendant l'administration Bremer, les États-Unis avaient mis fin à la tradition de l'ère Saddam de permettre aux tribus locales de siphonner une partie du pétrole passant sur leur territoire. Les insurgés, voyant cela comme un vol américain, entreprirent le sabotage systématique de l'oléoduc, et - malgré les féroces offensives de l'armée américaine - il resta fermé, excepté pendant quelques jours, durant les cinq années suivantes.


Le pipeline a été rouvert à l'automne 2009, lorsque le gouvernement irakien a rétabli la coutume de l'ère Saddam en échange d'un arrêt des actes de sabotage. Cela n'a été qu'une réussite partielle. Les livraisons ont été encore interrompues par des attaques de l'oléoduc, évidemment montées par des insurgés qui considèrent que les recettes pétrolières servent de financement illégitime à la poursuite de l'occupation américaine. La fragilité de l'oléoduc, encore aujourd'hui, est un signe de plus de la résistance en cours qui pourrait être un obstacle à toute augmentation significative de la production pétrolière jusqu'à ce que la présence militaire américaine soit terminée.


L'ensemble de la saga des six années de politiques, de pressions et de rêves pétroliers américains en Irak a donné jusqu'ici peu de résultats - pas d'augmentation significative de la production pétrolière irakienne, aucune augmentation de sa capacité future à produire, et aucune augmentation de ses exportations d'énergie. La grande ambition de transférer le contrôle effectif de l'industrie pétrolière entre les mains des compagnies pétrolières internationales s'est révélée être un projet mort-né.


Au fil des ans depuis que les États-Unis ont commencé leur campagne pour l'énergie, la production a en fait stagné, tombant parfois jusqu'à 40% en dessous des niveaux antérieurs à l'invasion, dans un secteur déjà maintenu précédemment à flot grâce au ruban adhésif et au système D. D'après les derniers chiffres de la Brookings Institution de Décembre 2009, la production s'élevait à 2,4 millions de barils par jour, soit 100.000 barils de moins que la moyenne quotidienne d'avant la guerre.


Pour ne rien arranger, le prix du pétrole, qui avait atteint des pics historiques au début de 2008, a commencé à décliner. En 2009, avec l'économie mondiale en lambeaux, les prix du pétrole ont coulés radicalement et le gouvernement irakien ne dispose même pas des recettes nécessaires pour soutenir ses dépenses courantes, sans parler de trouver de l'argent pour réparer ses infrastructures dévastées.


En conséquence, au début de 2009, le gouvernement Maliki a commencé activement, même désespérément, à chercher des moyens d'augmenter la production, même en l'absence de loi sur le pétrole. C'est, après tout, la seule voie possible pour un pays par ailleurs indigent à l'agriculture dévastée, souffrant d'une sécheresse d'une gravité extrême en vue d'augmenter les ressources disponibles pour des projets publics - ou, bien sûr, pour générer encore plus de corruption.


* Les compagnies pétrolières réagissent


En Janvier 2009, le gouvernement a ouvert un nouveau chapitre dans l'histoire de la production pétrolière en Irak quand il a annoncé son intention de permettre à une liste de plusieurs dizaines de compagnies pétrolières internationales de soumissionner pour des contrats de développement pour huit champs pétrolifères existants.


Les contrats proposés ne leur offrent pas, en fait, le type de contrôle sur le développement et la production que la task force Cheney avait envisagé en 2001. Au lieu de cela, ils seraient engagés à financer, planifier et mettre en œuvre une vaste expansion des capacités de production du pays. Après avoir remboursé leur investissement initial, le gouvernement devrait les récompenser à un taux ne dépassant pas deux dollars pour chaque baril de pétrole additionnels extraits des champs pétrolifères sur lesquels ils auraient travaillé. Les prix du pétrole devant théoriquement rester supérieur à 70 $ le baril, cela représenterait, une fois les coûts initiaux remboursés, un bénéfice pour le gouvernement irakien de plus de 60 dollars le baril, ce qui promettrait une résolution de la crise financière en cours dans le pays.


Les grandes compagnies pétrolières internationales, ont initialement rejeté ces termes du revers de la main, exigeant à la place un contrôle complet sur la production et des revenus d'environ 25 $ le baril. Cette résistance initiale a commencé à s'éroder, toutefois, lorsque la Chinese National Petroleum Corporation (CNPC), une compagnie publique du gouvernement chinois, a imposé à son partenaire, BP, l'énorme compagnie pétrolière britannique, d'accepter les conditions du gouvernement irakien pour augmenter la production du champ de Rumaila près de Bassorah dans le sud de l'Irak d'un million de barils par jour.


La compagnie chinoise, selon les experts, peut se permettre d'accepter des retours si maigres en raison de la volonté de Pékin d'établir une relation énergétique de longue durée avec l'Irak. Ce contrat, comme l'espèrent de toute évidence les dirigeants chinois, ouvrirait ainsi la porte à d'autres contrats pour explorer les vastes et sous-développées (et peut-être encore à découvrir) réserves de pétrole Irakiennes.


Les autres compagnies internationales se sentant peut-être menacées par la possibilité que les compagnies chinoises pourraient accumuler la plus grande partie des contrats concernant les plus riches champs pétrolifères irakiens, les laissant ainsi le nez dans la poussière, en Décembre une véritable ruée s'est produite pour présenter des offres. Au final, les principaux gagnants sont les entreprises publiques en provenance de Russie, du Japon, de Norvège, de Turquie, de Corée du Sud, d'Angola, et - bien sûr - de Chine. La compagnie nationale Malaisienne, Petronas, a établi un record en participant avec six partenaires différents dans quatre des sept nouveaux contrats que le gouvernement Maliki a distribué. Shell et Exxon, ont été les seules grandes major-compagnies pétrolières à participer à des soumissions gagnantes, les autres ayant dut céder face à des offres supérieures de consortiums dirigés par des compagnies publiques. Ces résultats suggèrent que les compagnies pétrolières nationales, contrairement à leurs concurrents privés recherchant la maximisation du profit, étaient plus disposées à renoncer à des bénéfices immédiats en échange d'un accès à long terme au pétrole irakien.


Sur le papier, ces contrats peuvent potentiellement satisfaire l'un des aspects de l'appétit pétrolier de Washington, tout en frustrant les autres. S'ils étaient pleinement mis en œuvre, ils pourraient collectivement stimuler la production irakienne de 2,5 millions à 8 millions de barils par jour en seulement quelques années. Ils ne remettraient pas, cependant, le contrôle de la production (ou la majeure partie des revenus) aux entreprises étrangères, ainsi l'Irak et l'OPEP pourraient continuer, s'ils le souhaitaient, à limiter la production, maintenir des prix élevés, et ainsi exercer leur pouvoir sur la scène mondiale.


Néanmoins, les centres de résistance à la politique pétrolière américaine ont exprimé leur opposition à ces nouveaux contrats. Les membres du Parlement ont immédiatement exigés que tous les contrats soient soumis à leur approbation, laquelle ne serait accordée qu'à la condition que des mesures de protection draconiennes soient accordées aux travailleurs, techniciens et gestionnaires irakiens. Les compagnies pétrolières appartenant à l'état irakien ont exigé des garanties que leurs techniciens, ingénieurs et administrateurs soient formés aux nouvelles technologies apportées par les compagnies étrangères, et qu'ils obtiennent le contrôle opérationnel des champs pétrolifères au fur et à mesure que leurs compétences se seront développées.


Le puissant syndicat du pétrole irakien s'est opposé aux contrats à moins qu'ils ne comprennent des garanties que tous les travailleurs seraient recrutés en Irak. Les chefs tribaux locaux ont exprimé leur opposition à moins qu'ils ne soit garanti une utilisation intégrale de travailleurs locaux, et de sous-traitance pour les entreprises de proximité au cours de la phase de développement. Puis il y a les insurgés, qui ont continué à s'opposer aux exportations de pétrole jusqu'à ce que les États-Unis se retirent complètement du pays, et ont exprimé leur opposition par les 26 attentats qu'ils ont lancés sur les pipelines et les installations pétrolières depuis Septembre 2009.


Certains de ces mêmes groupes ont réussi à bloquer les initiatives pétrolières précédentes.S'ils ne sont pas satisfaits, ils pourraient représenter le dernier obstacle à l'offre du gouvernement pour faire jaillir le pétrole en Irak. Un signe d'avertissement peut être perçu dans le destin d'un contrat signé avec la CNPC, au début 2009, prévoyant le développement du relativement petit (un milliard de barils) champ pétrolifère d'Ahdab près de la frontière iranienne. Les termes du contrat initial ont rencontré les conditions exigées par les dirigeants et les travailleurs locaux, mais le travail, une fois commencé, a généré peu d'emplois et encore moins d'opportunités d'affaires pour les entreprises locales. Les Chinois ont, à la place, fait venir des travailleurs étrangers, en suivant le modèle établi par des sociétés américaines impliquées dans la reconstruction irakienne. Finalement, le matériel a été saboté, le travail mis à mal et la viabilité du projet reste menacée.


La fin n'est pas en vue et l'issue reste incertaine. Est-ce que les vastes réserves pétrolières irakiennes vont être bientôt exploitées et venir enfin assouvir la faim du marché mondial ? Si elles le sont, qui déterminera la vitesse d'écoulement, et ainsi exercera le pouvoir que confère cette prise de décision ? Et une fois que cet océan de pétrole sera vendu, qui va en recevoir les potentiellement incroyables revenus ? Comme pour tant d'autres choses, au sujet du pétrole irakien, la guerre américaine a généré une multitude de problèmes et de catastrophes - et très peu de réponses.

Traduction : BDGD

*Michael Schwartz est professeur de sociologie à la Stony Brook State University. Il est l'auteur de War Without End: la débâcle irakienne dans son contexte (Haymarket Press), qui explique comment la géopolitique militarisée du pétrole a conduit les Etats-Unis à démanteler l'Etat irakien et l'économie de ce pays tout en alimentant une guerre civile sectaire. Il collabore régulièrement au site TomDispatch.com.


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